Contexte scientifique
Identifier et mesurer les violences, saisir le contexte et conséquences des violences subies
Reconnue à l’échelle internationale en tant que problème social majeur, les violences envers les femmes ont fait l’objet de nombreuses études et enquêtes statistiques au cours des vingt dernières années. Cependant, la connaissance statistique sur cette thématique reste lacunaire et inégale au sein des territoires d’outre-mer. Une meilleure prise en compte politique de ces violences nécessite par ailleurs de renouveler et de compléter les connaissances sur le sujet.
En France, l’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (Enveff), réalisée en 2000, a marqué une étape importante dans l’acceptation du phénomène en tant qu’objet scientifique. Elle a permis de mesurer la fréquence et d’identifier les formes des violences et les contextes sociaux dans lesquels elles se produisent. Cette enquête fait également référence en matière de connaissance des mécanismes favorisant l’exposition des femmes aux violences, et des conséquences de ces actes. En facilitant la déclaration des violences auprès de diverses institutions ou associations, elle a contribué à « briser le silence » et à cerner les besoins des femmes. Elle a enfin permis de mieux formuler les actions de prévention et de soutien des victimes, ainsi que les lois comme celle permettant l’éloignement du conjoint violent.
La demande du renouvellement de cette expérience s’est amplifiée en France vers la fin des années 2000. C’est ainsi qu’une nouvelle enquête, nommée Violences et rapports de genre (Virage),qui intègre également un échantillon d’hommes, a été programmée et réalisée en 2015. Pour des raisons techniques, elle a été limitée à la France métropolitaine.
Adapter le questionnaire aux spécificités des territoires d’Outre-mer dans trois départements-régions d’Outre-mer : Virage dans les Outre-mer (2018)
Confrontés aux réalités du terrain et au constat d’une augmentation du nombre et de la gravité des violences interpersonnelles dans les départements et les régions d’outre-mer, les élus locaux et d’autres acteurs de terrain ont montré un fort intérêt vis-à-vis de la mise en place d’une enquête similaire à Virage sur ces territoires.
Au cours des années 2000, des enquêtes ont été réalisées à La Réunion, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie puis à la Martinique, basées sur le modèle de l’enquête Enveff. D’après les résultats de ces travaux, les sociétés ultramarines présenteraient un nombre de caractéristiques favorisant la survenue des violences. Ils montrent que les inégalités territoriales, en termes d’accès à l’emploi, à la formation et aux services constituent des enjeux pour la sécurité des femmes. En même temps, nous connaissons peu les facteurs de résilience et comment certaines configurations sociales offrent des "effets protecteurs".
Grâce à cette nouvelle enquête, Virage dans les Outre-mer, et à un doublement des effectifs par rapport aux enquêtes précédentes, nous avons la possibilité d’actualiser et d’approfondir les connaissances des contextes et impacts des violences subies à La Réunion et en Martinique.
Pour la Guadeloupe, l’enquête fournira pour la première fois des données statistiques sur les violences interpersonnelles liées aux rapports de genre.